Limiter l'impact d'un turnover important

Nous avons tendance, en France, à considérer les changements de métiers comme preuve d’instabilité, et donc à écarter ces salariés des recrutements. 83% des DAF se déclarent prêts à éliminer un candidat sous prétexte qu’il est un « job zappeur ».

Entendez par « job zappeur » le fait d’avoir changé de job 3 fois en moins de 10 ans. Souvent par volonté d’évolution professionnelle, mutation du conjoint, ou encore simplement une envie de changer d’air…

Mais les Jobs Zappeurs ont acquis de l’expérience dans différentes organisations et peuvent en conséquence être une réelle force pour votre entreprise. Comment configurer votre structure pour accueillir ce type de profil sans pour autant mettre en péril votre organisation à chaque départ ?

"Il ne va pas rester"

Non, il ne restera peut-être pas longtemps. Mais ils resteront de toute manière de moins en moins longtemps.

Les générations précédentes aspiraient pour la majorité à travailler pour une seule entreprise dans leur vie. Les personnes arrivant maintenant sur le marché du travail changeront en moyenne 5 fois de métier au cours de leur vie (Source : Insee). Pour ma part, j’ai 35 ans et j’entame mon 3ème métier.

Vous avez deux manières de voir les choses :

  1. Penser à la difficulté que va représenter son départ inéluctable de votre entreprise, d’ici quelques trop courtes années : la difficulté d’un nouveau recrutement, le temps nécessaire à former le nouveau salarié, …
  2. Penser aux années d’expériences de cette personne, aux nombres d’entreprises différentes qu’il a connu, au regard critique qu’il a pu développer… Autant d’expériences qu’il apportera avec lui dans votre entreprise, et qui resteront après son départ.

La question est donc de savoir comment adapter l’entreprise à cette nouvelle réalité du monde du travail, bien plus que de continuer à rechercher le Graal : « le salarié compétent, motivé, qui restera advitam dans votre entreprise ».

S'adapter à cette nouvelle réalité

Il est donc nécessaire d’accepter le fait que les salariés ne font que passer dans votre entreprise. Et de configurer votre entreprise pour ne plus subir les allers et venues des salariés, mais faire en sorte que ce process se simplifie au maximum. 

Ce qui demande de retravailler plusieurs points : 

1- Structurer l'intégration pour l'accélérer

Beaucoup d’entreprises fonctionnent sur des habitudes, des choses que chacun a appris en faisant. Tout le monde sait que les fournitures sont commandées via un formulaire précis, que la réserve de papier est à tel endroit, qu’il ne faut jamais accepter telle condition de vente avec un client, …. Ce sont autant de connaissances implicites que chacun acquiert au fur et à mesure du temps passé en entreprise.

Il faut alors faire l’effort de simplifier, écrire, rendre lisibles ces règles, afin qu’un nouveau salarié puisse très rapidement savoir où trouver ces informations essentielles. Pas besoin de créer un intranet ! Un simple document synthèse, bien pensé, sera déjà une excellente première étape. Et un processus d’intégration clair, structuré, permettra de donner un premier niveau d’information, un tronc commun à tout nouveau salarié, permettant de limiter la perte d’information lors des phases de transition.

2- Retirer un maximum du temps qu'il aura passé dans votre entreprise

Le salarié « zappeur » aura déjà connu plusieurs entreprises auparavant, et peut-être même plusieurs métiers. Il aura vécu différentes méthodes d’organisation, et pourra en faire bénéficier votre entreprise. C’est précieux ! 

Une bonne pratique est de lui demander de remplir un « rapport d’étonnement » un mois après son arrivée. Qu’est-ce qui l’a surpris en arrivant dans votre entreprise ? Ces réponses pourront être riches d’enseignement, si vous prenez le temps de les exploiter. Encouragez-le à apporter son regard critique (mais constructif) sur votre entreprise tout au long de son expérience au sein de votre entreprise. 

3- Encourager le partage de compétences au sein de l'équipe

Afin de diminuer l’impact des départs de salariés, il est critique d’encourager le partage de compétences au sein des équipes

Il ne faut pas que des savoirs disparaissent, lorsqu’un salarié décide de quitter l’entreprise. Et il ne faut pas non plus qu’un salarié compétent qui ne reste que deux ans dans votre entreprise ne puisse pas partager son savoir avec ses collègues, et repartent avec les mêmes compétences avec lesquelles il est arrivé. Pour cela, de nombreux moyens existent, déjà éprouvés dans de nombreuses entreprises !

4- Ne pas perdre la connaissance acquise !

Nous l’avons tous vécu :

  • On arrive dans une entreprise, on a de nouvelles idées, et on nous informe par hasard après quelques temps que la piste a déjà été explorée par notre prédécesseur et qu’il en déjà retiré des enseignements…
  • On s’aperçoit que le prédécesseur ne remplissait pas correctement le CRM et que beaucoup de données ont été perdues…

Autant de connaissances qui auraient pu (dû ?) être communiquées lors du départ du prédécesseur.

C’est pourquoi il est nécessaire de s’assurer que le salarié a bien préparé son départ (rendez-vous de passation avec chacun de ses collègues, remplissage de la CRM, documentation de ses projets en cours, …). L’idéal reste bien entendu de fonctionner en binôme avec son remplaçant pendant les 15 jours qui précèdent son départ.   

Et s'ils restaient ???

En travaillant ces 4 points clés, vous permettrez aussi à vos salariés d’être reconnus pour leurs expertises (point 2) et de développer leurs compétences (point 3).

La reconnaissance et le développement des compétence sont aussi deux des principales attentes des salariés, en 2021… Parmi d’autres…

Et si le fait de professionnaliser le départ et l’arrivée de salariés dans votre entreprise contribuait aussi à les y faire rester ??? A méditer !

L'auteur

Vincent Talbourdet

Stratégie d'entreprise & Modèles économiques

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